Pardonne-moi mon bébé, pardonne-moi mon enfant ;
Je n’ai su me montrer digne d’être parent
Tout ce que je pouvais, je crois l’avoir fait pourtant,
Dans ce monde impitoyable, même l’absolu est insuffisant,
Te donner la vie fut mon exploit le plus grand ;
Tes premiers cris et pleurs, le plus beau des chants ;
Oh mon Dieu, je n’aurais jamais pensé regretté ces instants ;
Car c’est à la mort que je t’ai conduit finalement,
Te voir grandir, j’en ai été si impatient ;
Mais si j’avais su, j’aurais arrêté le temps ;
Car d’avenir, tu n’en as plus maintenant
Que la folie des hommes, partout la désolation répand,
J’avais entendu comment ils étaient violents ;
Et comment ils exultaient à répandre le sang.
Comment ils traitaient durement même enfants, à fortiori grands ;
Comment pouvais-je laisser tes sens à la rage de ces méchants ?
Dans cette nuit noire, brille la lune au firmament ;
Mais elle est opaque, l’obscurité du cœur de ces gens ;
Dans mes entrailles, insupportable est le déchirement
Moi qui t’ai ouvert les yeux, moi je te les referme définitivement,
Avais-je le choix ? Pouvais-je faire autrement ?
Quand je savais, la souffrance indiscible te ménaçant?
La pitié, aucun d’eux ne la ressent
Tant ils aiment à plonger les leurs dans le tourment,
Je les ai vu qui arrivaient, gourdins, dards, lames agitant
Et à côté de leur furie, les abysses semblaient bien plus séduisants;
De partir, mon enfant, pour nous fut venu le moment
Au pied de cette jétée, j’ai perçu l’appel du néant.
La chaleur de ton si beau corps s’en va, je le sens
Tes convulsions baissent en intensité tout doucement
Contre moi je t’ai serré ; mais les forces m’ont quitté à présent
Aux fonds de ces eaux troubles, nous nous retrouverons, là où la Faucheuse nous attend,