Les jours passent comme des voitures
Sur l’autoroute de nos vies qui saturent
Moins embouteillées par l’écriture
Que par des problèmes d’autres natures.
Les mots ne trouvent plus sur nos feuilles,
Les chemins qu’ils arpentaient presque tout seuls
Se sont-ils alors nichés, peureux, dans un linceul
La vie d’adulte les ayant tous rendus veules.
Voilà qu’il faut savoir être le parfait boss,
Savoir aussi prendre soin de ses gosses
Au fil du temps, pressés, s’enfuyant loin devant
On écrit aussi bien qu’on tirerait à blanc.
Et l’encre de nos doigts las qui s’assèche
S’échine à remplir des formulaires de crèche.
« Éduque bien ton fils sinon tu pèches »
Repris en chœur dans tous les prêches.
À toujours chercher à écrire mieux
Les poètes ont fini par écrire moins
Leurs mots se refusant de briller de mille feux
Jouant à cache-cache dans leur coin.
Et à mesure qu’en nous s’installe le doute
De ce futur qu’on rêve radieux coûte que coûte,
Les mots se lassent de notre poésie dissoute
Dans le quotidien de nos volontés en banqueroute.