Une saveur maussade a investi mon palais;
Peut-être un arrière goût du sang qui submerge le palais,
Mais en fait, c’est d’avoir survécu que je souffre.
Car je ne sais quel est le plus triste des sorts,
Dans les profondeurs de la betise, avoir trouvé la mort,
Ou vivre pour voir que personne n’en a tiré la moindre leçon.
Et que tous prostituent l’histoire à leur convenance,
Au nom d’une justice sanguinaire aux allures de vengeance,
Qui se croyant victime, exorcise le mal par le crime.
Fausse victime de guerre, vraie victime d’un effet pygmalion,
Plan de Dieu, ou désavoeu désastreux de notre entêtement honteux?
Car j’ai scruté le ciel, je n’ai vu descendre aucun feu.
Ni de démon dans les rues s’amuser à la roquette,
Que des mains d’hommes faire joujou à la baballe et à la machette ;
Quand les mortiers jouaient avec fierté leur partition.
Et que nos pleurs repondaient en chœur à l’unisson
J’avais cru revolu la quête du salut par les canons;
C’est à croire que nos larmes étaient juste la fumée dans nos yeux;
Car nous revoilà prêts à mettre femmes et enfants dans la gadoue,
Pour ceux qui, pour conquérir, ou ne pas tomber de leur trône,
Jugèrent bon d’ôter la vie aux moins chanceux d’entre nous;
Ou estimons-nous que laver l’affront subi en vaut le prix ;
Mais elle n’existe pas encore, la balle à reconnaissance d’obédience politique,
Pas plus que l’obus à détection de groupe ethnique;
D’ailleurs, comment s’en sortir, quand on a donné des armes
A des quidams qui pour dompter le stylo à bille, ont eu tant de mal ?
Pourtant, bien plus précarisés sont bien sortis d’une telle spirale,
Mais comme il est de nos coutumes de n’en point prendre de graine,
Et que la file d’attente est si longue aux portes de la géhenne
Allons ! faisons la guerre ! empruntons les voies de la haine !
Mais à tous ces revenchards qui l’appellent de tous leurs vœux,
Que le ciel me pardonne, mais je fais la prière que
Les premières salves d’obus soient pour eux.